Tranquillement installé dans son hamac abrité du soleil par la tôle de son cabanon, Syed, pêcheur de crabes, se redresse, mi-inquiet mi-intéressé, quand il comprend, en ce début de mois de mars, que les visiteurs qui marchent sur son ponton sont des militants 'anti-Lynas'. Autrement dit, des opposants à la gigantesque usine d'extraction de terres rares, quasi terminée, en amont de 'sa' rivière.
Au terme d'un processus industriel qui, en Chine, s'est révélé une calamité pour l'environnement, l'usine de la compagnie minière australienne Lynas déversera, une fois en service - en principe d'ici à juin - ,500 000 litres d'eau par heure dans la Sungai Balok, le tranquille cours d'eau qui charrie des flots opaques rougis par l'acidité naturelle des sols. L'estuaire est juste là, à quelque 300 m à l'est, devant le ruban turquoise de la mer de Chine. Comme les autres pêcheurs du lieu, Syed sait surtout de cette usine qu'elle sera 'radioaktif', comme on dit en malais. Il n'est pas allé à la grande manifestation d'opposition du 26 février parce que, dit-il, ce sujet a divisé tout le monde ici.
Pour lui, la situation n'a fait que se dégrader depuis la création de la zone industrielle de Gebeng, à proximité. Il ne pêche plus qu'après la marée haute quand la rivière a été 'nettoyée' par la mer. Un jour, les poissons sont apparus morts à la surface. Depuis une vingtaine d'années, tourbières et mangroves ont peu à peu cédé la place à des usines de pétrochimie hypersophistiquées, dont on voit les entrelacs rutilants de tuyaux, de citernes et de cheminées derrière des clôtures de haute sécurité.
Malgré sa taille imposante - dix hectares -, le site de Lynas, lui, est presque invisible. On l'aperçoit de la grand-route qui longe la côte est de la Malaisie, à mi-chemin entre Kuantan, capitale de l'état de Pahang, et le Club Med de Cherating. Nos demandes de visite e...
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